JUSTIN CATAYÉE , un destin perdu
Il y a 60 ans le 22 juin 1962, Justin CATAYÉE, député de la guyane , a perdu la vie dans le crash d’un avion sur les hauteurs de Deshaies. Cette voix brisée en plein vol n’a jamais été oubliée.
Sa Vie
Justin CATAYÉE est né à Cayenne en Guyane le 30 mai 1916. Fils d’une famille de quinze enfants son père Julien André CATAYÉE, boulanger, et sa mère Marie-Louise sont originaire de Martinique. Justin passe les premières années de sa vie à Sinnamary où son père est représentant de la maison Tanon.
En raison des problèmes de santé du père, la famille CATAYÉE quitte la Guyane et retourne en Martinique où le jeune Justin effectue ses études primaires et secondaires . Au cours de sa scolarité, lors d’un accident dans la cours de récréation il perd son œil gauche. Il part ensuite en France hexagonale pour obtenir une licence de mathématique et d’astronomie. Mais la guerre interrompt son projet. Réformé du service militaire à cause de son œil gauche, il réussit à se faire engager en novembre 1942 dans les Forces Françaises Libres en tant que conducteur de char. Le 8 octobre 1944, à Belfort, il saute sur une mine et aura l’épaule et la mâchoire arrachée. Après la résistance, il reprend ses études.
En 1948, il obtient une licence ès-sciences à l’Université de Bordeaux . il est muté au collège de Cayenne en février 1949 puis deviendra professeur titulaire au lycée Félix ÉBOUÉ de Cayenne en 1951.
Son parcours politique
Il sera initié par son père à l’idéologie socialiste en l’accompagnant à de nombreuses réunions du parti. Il entre pleinement en politique en intégrant la section guyanaise de la SFIO (Section Française de l’Internationale Ouvrière). En 1956, il quitte la SFIO, démissionne du conseil municipal et décide de fonder le Parti Socialiste Guyanais (PSG). Il en devient immédiatement secrétaire général.
Il crée également le journal « Debout Guyane », qui lui permet de propager ses idées. Le 30 novembre 1958, Justin CATAYÉE est élu député de Guyane. Dans l’hémicycle, il consacre l’ensemble de ses interventions à la Guyane, à ses problèmes et à son statut administratif. Soutenu par le Front Démocratique Guyanais (FDG), il décide de partir à Paris au début du mois d’avril 1962 pour présenter et réclamer à la session parlementaire, un statut spécial d’autonomie de gestion pour la Guyane. En pleine séance, il est alerté le 14 Juin 1962 sur la terrible répression faisant suite à la manifestation du F.D.G. contre l’établissement de la Légion Etrangère en Guyane. Justin CATAYEE décide d’écourter sa présence à la session et de rentrer en Guyane afin d’être à la tête du défilé de protestation organisé par le F.D.G. le 25 Juin 1962.
L’accident
Malheureusement, Le 22 juin 1962, le Boeing 707 de la compagnie Air France qui le ramène en Guyane s’écrase sur une colline de la commune de Deshaies en Guadeloupe, plongeant la Guyane dans un grand désarroi.
Justin CATAYÉE décède ainsi que le pilote, les membres de l’équipage et 103 autres passagers. Dans le même avion se trouvent deux autres Guyanais Roger SADECKI et Jacques MASSEL ainsi que deux autonomistes antillais Albert BEVILLE, poète connu sous le nom de Paul Niger, l’un des fondateurs du Front Antillais et Guyanais pour l’Autonomie et Roger TROPOS.
C’est l’incompréhension autour de cet accident. Plusieurs questions sans véritable réponse se posent:
Comment cela a-t-il pu arriver avec un avion « le château de chantilly » quasiment neuf ? Un pilote chevronné ayant conduit l’avion du président De Gaulle à plusieurs reprises ? Comment Albert Béville, haut fonctionnaire de l’administration coloniale, anciennement en poste au Mali et au Sénégal, militant pour l’indépendance de la Guadeloupe, particulièrement surveillé, échappe pourtant au contrôle de police et réussit à embarquer ?
Dès lors, la rumeur d’un attentat visant les autonomistes présents dans l’avion est avancée. Cette thèse alimentée par le PSG et la famille de Justin CATAYÉE, prend forme et persiste en Guyane.
Le rapport de la commission d’enquête du 12 décembre 1962 ne fut pas rendu public à la demande du Premier ministre et seul le pilote fut mis en cause ce qui éteignait toutes les actions en justice.
La reconnaissance
La mémoire de Justin CATAYÉE est entretenue en Guyane, avec notamment un collège de Cayenne qui porte son nom, ainsi que la rue Voltaire de Cayenne renommée rue Justin CATAYÉE. C’est dans cette rue d’ailleurs que se trouvait au numéro 32 le premier siège du Parti Socialiste Guyanais.
Le 25 juin 2015, une stèle a été inaugurée par le maire de Pointe-à-Pitre, Jacques BANGOU, en présence de proches de Justin CATAYÉE et d’élus guyanais devant l’école Raphaël Jolivière, située rue Hector Louis Dessout, dans le quartier de Lauricisque.
Des stèles ont été érigées, en mémoire des victimes, dédiée à Justin Catayé et Albert Béville pour le cinquantenaire de l’événement. Des débris d’avion témoignent encore de la violence du choc.